Nouvelle loi sur l'indivision : ce qu'il faut savoir
Posséder un bien immobilier à plusieurs est une bonne idée. L’indivision peut être choisie (achat d’un appartement entre concubins) ou subie (héritage d’un bien en indivision entre plusieurs héritiers). Toutefois, l’indivision pose aussi de nombreuses difficultés en cas de désaccord. Face à la multiplication des litiges, une nouvelle loi sur l’indivision est en place. Plus particulièrement, il s’agit de l'ordonnance n°2019-964 du 18 septembre 2019.
17 juillet 2024
Qu’est-ce que l’indivision ? Rappels sur cette notion
L’indivision est un système de partage de droits. Chaque indivisaire détient une quote-part du bien immobilier, en fonction de son investissement financier initial.
Chacun possède des droits sur l’ensemble du bien, et non pas sur une pièce en particulier ! Les indivisaires se partagent ainsi les 3 membres du droit de propriété : l’usus et le fructus (usufruit) d’un côté, l’abusus (nue-propriété) de l’autre côté. C’est donc différent du démembrement de propriété.
Chaque indivisaire participe aux charges à proportion de sa détention. Logiquement, il est imposé sur les revenus générés en cas de location du bien immobilier, à hauteur de sa quote-part également. En cas de vente, le partage de la plus-value éventuelle se fait de la même manière.
L’indivision se rencontre dans plusieurs situations :
- l’achat d’un logement entre concubins ;
- lors d’un divorce, les époux récupèrent les droits sur les biens à hauteur de leur investissement ;
- lors d’une succession, un bien immobilier est transmis à plusieurs héritiers en indivision.
L’indivision peut sembler simple en raison de l’absence de formalisme. Pas besoin de créer une SCI (société civile immobilière). Tout le monde s’entend bien au départ… C’est lorsque la situation se dégrade que les inconvénients de l’indivision surgissent.
Qui est propriétaire en cas d'indivision ?
Tous les copropriétaires indivisaires sont légalement et collectivement propriétaires du bien immobilier. Ils détiennent chacun une quote-part indivise du bien, autrement dit une part abstraite du total, sans division physique de la propriété.
Ainsi, les indivisaires détiennent des droits proportionnels aux parts détenues dans l’indivision. Par exemple, si Monsieur X. possède 30 % d’une maison dans l’indivision, il aura droit à 30 % des revenus générés par cette maison et devra s’acquitter de 30 % des charges.
Comme pour tout logement, le bien indivis nécessite une gestion optimale. En pratique, sa gestion requiert l’accord de l’ensemble des indivisaires, principalement s’il s’agit d’opérations importantes comme la vente ou la location. Toutefois, un ou plusieurs indivisaires peuvent prendre des décisions pour des actes courants et de gestion classique du bien. Les indivisaires chargés de ces prises de décisions doivent avoir les 2/3 des parts d’indivision. Sachez également que les actes conservatoires peuvent être décidés par un ou plusieurs indivisaires sans qu’il soit nécessaire de se référer aux autres. Il s’agit des actes destinés à conserver le bien, comme des travaux urgents de réfection d’une toiture ou de remplacement d’une chaudière défectueuse.
Voici un tableau qui vous présente différents actes engagés sur le bien immobilier et les règles en matière de prise de décision entre les indivisaires :
Copropriétaires indivis et prise de décision sur le bien immobilier
Type d'actes | Règle juridique en matière de prise de décision | Exemple concret |
---|---|---|
Actes conservatoires | Possibilité de prendre la décision seul en urgence pour conserver le bien indivis | Réfection de la toiture après une tempête |
Actes de gestion | Un accord à la majorité des 2/3 des parts d'indivision | Renouvellement du bail d'habitation, Vente de meubles indivis |
Actes de disposition | Un accord à l'unanimité des indivisaires est requis | Vente du bien indivis, donation à un tiers |
Qui doit payer la taxe foncière en cas d'indivision ?
Le mécanisme d’indivision engage chaque personne qui en fait partie. Ainsi, la taxe foncière doit être payée par tous les copropriétaires indivisaires, en proportion de leur quote-part dans l’indivision.
L’administration fiscale adresse généralement l’avis d’imposition de taxe foncière à un seul indivisaire. Il s’agit souvent de celui qui a pris la responsabilité de recevoir les correspondances officielles. Ensuite, les indivisaires doivent s’organiser entre eux pour garantir une répartition équitable et payer la taxe foncière en temps et en heure, conformément aux parts qu’ils détiennent chacun dans l’indivision.
En cas de litige il est opportun de vérifier les documents légaux et notamment l’acte de propriété et autres documents juridiques pour s’assurer des droits et responsabilités des indivisaires. Si un état de répartition des charges est prévu dans les documents de l’indivision, vous pouvez utiliser ces écrits dans le cadre d’une éventuelle action en justice. Si un ou plusieurs indivisaires ne souhaitent pas payer, les autres peuvent être contraints de couvrir leurs parts de taxe foncière afin d’éviter une pénalité. Dans ce cas, il est toujours possible d’engager des démarches par la suite afin de récupérer les montants payés en trop.
Pourquoi une nouvelle loi sur l’indivision s’imposait ?
La mésentente entre les propriétaires indivisaires pose problème. Longtemps, le Code civil a imposé l’unanimité pour sortir de l’indivision et prendre les décisions importantes.
En 2009, une nouvelle loi sur l’indivision autorise la sortie avec une majorité absolue ou majorité des deux-tiers. En pratique, cela s’est avéré insuffisant.
L’article 815 du Code civil prévoit que nul ne peut être contraint à demeurer en indivision. En cas de désaccord persistant, le juge peut décider une vente par adjudication. Mais ce n’est pas toujours la solution idéale.
L'ordonnance du 18 septembre 2019 crée donc de nouvelles règles en vigueur depuis le 1er janvier 2020. L’objectif est de faciliter la sortie de l’indivision. Découvrons le détail de cette nouvelle loi sur l’indivision.
Les changements de la nouvelle loi sur l’indivision
Désormais, la sortie de l’indivision est possible à tout moment, sauf :
- si une convention d’indivision prévoit des règles contraires ;
- si un tribunal interdit la sortie de l’indivision.
Il est par exemple interdit de prévoir dans son testament que le bénéficiaire du bien immobilier soit obligé de rester dans l’indivision.
Pour sortir de l’indivision, encore faut-il trouver une solution concrète pour ses droits :
- vendre ses parts aux autres indivisaires présents ;
- vendre ses parts à un tiers, qui devient un nouvel indivisaire ;
- partager.
L’intervention d’un notaire est obligatoire.
Les droits de mutation à titre onéreux se répartissent lors de la vente entre les co-indivisaires. Le droit de partage est fixé à 2,5 %. Toutefois, depuis 2022, il est de 1,1 % en cas de partage suite à une séparation, un divorce ou une rupture de Pacs.
Vendre aux autres indivisaires
Vous ne voulez pas rester en indivision ? Le plus simple est de vendre vos droits à vos camarades. Si plusieurs personnes sont intéressées, la vente s’effectue au prorata des parts détenues.
Vendre ses droits à un tiers
La nouvelle loi prévoit la possibilité de vendre ses parts à un tiers. Toutefois, le vendeur doit au préalable proposer ses parts à ses co-indivisaires. Ceux-ci disposent d’un mois pour se décider.
Après un mois, en cas de refus ou d’absence de réponse, le vendeur peut céder ses parts à toute personne extérieure à l’indivision.
Partager ses droits
Le partage des droits sur des biens communs nécessite de bien s’entendre. Le déséquilibre peut s’arranger avec des contreparties financières. Le partage peut désormais se réaliser au sein d’un SCI créée à cet effet. Cela permet d’éviter les déséquilibres dans le partage.
Cette nouvelle loi sur l’indivision ne résout pas toutes les difficultés liées à cette situation . que l’indivision soit choisie ou subie, il est préférable d’anticiper tous les cas possibles au sein d’une convention d’indivision rédigée avec un professionnel.
Les points à retenir
- La nouvelle loi sur l’indivision en place depuis 2020 permet de sortir plus facilement d’une indivision.
- Chacun peut désormais sortir de l'indivision à tout moment (sauf clause contraire de la convention d’indivision ou décision du tribunal).
- La nouvelle loi prévoit la possibilité de vendre ses parts aux autres indivisaires ou à un tiers ou encore de les partager.
- Attention, des frais de notaire et droits de partage sont alors à prévoir.